Le confinement, une situation exceptionnelle qui a creusé le fossé numérique


Rédigé par Tony Canadas le Lundi 11 Mai 2020 à 15:57

Après huit semaines de confinement, suite à la propagation rapide du dernier coronavirus, l’étau se desserre pour les citoyens français, avec pour ligne d’horizon une crise économique et un accroissement des inégalités sociales pour ceux qui n’ont pas eu accès aux outils numérique, notamment les familles les plus démunies et les petits commerces de proximité. C’est le sens de l’analyse de Tony Cañadas, Président de l’association La Ville Intelligente et Citoyenne et trésorier de l’association HTTPS , hub des talents des territoires Paris Saclay.


Ce sont surtout les petits commerces de proximité qui vont payer le prix fort de cette crise sanitaire et économique (photo Adobe Stock)
Creuser les inégalités : c’est sans doute l’un des effets dévastateurs du confinement que nous venons de vivre. Que ce soit dans l'éducation, pour les familles qui n’ont pas pu accéder à l’école à distance par manque d’ordinateur ou de tablette, ou dans la vente de produits de première nécessité par des commerces de proximité et producteurs locaux contraints de baisser le rideau, sans pouvoir vendre en ligne, ces huit semaines auront été des plus difficiles. 
 
Cette période de cessation d’activité économique aura démontré qu’un nombre croissant de consommateurs se montrent attachés au commerce local, pour l’achat de leurs produits de première nécessité. A condition d’avoir une échoppe ouverte à proximité. D’autres, plus nombreux, et surtout bien équipés, se sont orientés, par manque de temps ou tout simplement par simplicité, vers le commerce en ligne. 
 
Face à cette crise, les géants de l'internet et les grandes distributions se sont rapidement adaptés, soucieux de ne pas voir leur clientèle leur échapper. Ils ont alors saisi l’opportunité de l'outil numérique pour proposer des nouveaux services répondant aux attentes des usagers, en orientant même leur communication dans ce sens. Ces derniers ont d’ailleurs enregistré, pendant cette période, des profits records, poussant comme à l’ordinaire vers une surconsommation avec des offres dimensionnées pour l’occasion. 
 
Une fois encore, difficile pour le commerce local de lutter à armes égales avec la grande distribution ou les géants de la vente en ligne, lesquels ont les moyens et les arguments pour tirer avantage d’une crise comme celle que nous vivons. Loin de se laisser abattre, le petit commerce doit aussi tirer les leçons des nouveaux modes de consommation de ces huit semaines de confinement, en se fixant un objectif : « si le consommateur ne vient pas à lui, il doit aller vers lui », en proposant des services équivalents aux grandes enseignes, avec les mêmes outils et des arguments sommes toutes supérieurs eu égard de la traçabilité et de la qualité de leurs produits.
 
Si dans l’état actuel de la technologie, c’est tout à fait possible, certains diront que c’est un manque de volonté de la part des petits commerçants de proximité. C’est une remarque que l’on entend souvent. Plus que la volonté, c’est vraisemblablement la méconnaissance et le manque de maitrise des nouveaux outils de communication qui freine les petits commerçants. Une difficulté qui fausse la concurrence et ne permet pas à ces derniers d’apporter le même niveau de service que les grandes enseignes. 
 
Des solutions existent et certaines sont même nées pendant le confinement, pour fédérer les petits commerçants et leur permettre de proposer des boutiques en ligne. Mais le nœud du problème reste bien de faire en sorte que chacun qu’il soit producteur, vendeur ou consommateur ait accès aux mêmes outils et au même niveau de connaissance. 

Le digital, un outil au service de l’humain

D’autant que s’il y a bien une leçon à tirer de cette période d’inactivité économique, c’est que le digital, que ce soit pour l’école, le télétravail ou les courses, s’est révélé très opportun pour tout un chacun, au point que certains vont sans doute continuer.  Car en plus de ne pas couper les liens avant la crise sanitaire, le digital nous a fait repenser nos modes de fonctionnement, en nous faisant réaliser, au passage de sérieuses économies, en matière de déplacement, en optimisant nos achats et en réduisant le niveau de pollution des zones urbanisées. 
 
Fort de ce constat nous devons faire en sorte que l’inclusion numérique soit l’une des clés pour acheter local, notamment en zone urbaine. Pour cela nous devons nous orienter vers « l’e-inclusion », un processus accessible à chaque individu, pour lui transmettre les compétences numériques qui leur permettront de faire de ces outils, un levier de l’insertion sociale et économique. 
 
Et sous l’angle écologique, tout aussi important, cette période nous aura appris à ne plus voir le numérique comme un simple produit de consommation ou un outil marketing, même si son bilan carbone n’est pas toujours vertueux, mais plutôt comme un outil au service de l'humain. Un outil qui doit permettre la réduction des inégalités et exclusions sociales et pas l’inverse. Un levier de transformation individuelle et collective. 
 
Désormais le digital, nous permet de « monitorer » l’évolution des écosystèmes et de la biodiversité, ou encore prédire les impacts du réchauffement climatique et des phénomènes météorologiques. Il permet aussi de mettre en commun nos ressources, nos savoirs, nos expertises et nos idées pour faire émerger des initiatives innovantes, mettre en lumière de nouvelles façons travailler et développer une culture commune entre acteurs de l’écologie du numérique. Mais nous le savons tous, dans la ville intelligente que nous imaginons, il faudra accompagner les utilisateurs pour opérer et pérenniser ce changement, sans parler de la volonté de chacun qui est en soi la première démarche. 

Tribune co-écrite par Tony Cañadas et Yannick Sourisseau





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