L’Agglomération de Nevers reste vigilante à ce que ses actions en matière de digital et d’innovation puisse profiter à l’ensemble des habitants


Rédigé par MISSION ECOTER le Vendredi 14 Mars 2025 à 12:10

La France a récemment accueilli le Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle dont l’objectif est de contribuer à la réussite du virage de l’IA en la mettant au service du collectif et de l’intérêt général de manière inclusive, tout en préservant nos libertés et en garantissant une correspondance entre les usages et les valeurs humanistes


« L’Agglomération de Nevers reste vigilante à ce que ses actions en matière de digital et d’innovation puisse profiter à l’ensemble des habitants et soit en faveur de l’inclusion numérique, afin de permettre à chaque citoyen de bénéficier des apports du numérique et de tirer le meilleur parti des innovations développés sur le territoire. »

La France a récemment accueilli le Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle dont l’objectif est de contribuer à la réussite du virage de l’IA en la mettant au service du collectif et de l’intérêt général de manière inclusive, tout en préservant nos libertés et en garantissant une correspondance entre les usages et les valeurs humanistes. Ce Sommet a été aussi l’occasion pour le Président de la République, très mobilisé sur ce sujet depuis 2017, de montrer que la France ambitionne de devenir la figure de proue européenne dans le domaine de l’IA.

Néanmoins, les Français se méfient de l’intelligence artificielle. Une méfiance légitime si l’on considère que l’IA présente des risques, notamment en termes de qualité et de véracité des informations et d’impact écologique (puisque l’IA est coûteuse en énergie). 84 % d’entre eux estiment tout de même qu’elle jouera un rôle déterminant dans la gestion et la résolution des problèmes de leur vie quotidienne, tant sur le plan personnel que collectif. Ils sont donc conscients que l’IA est à la fois une innovation utile et fascinante et une évolution inéluctable et inquiétante. Rappelons déjà que l’intelligence artificielle n’est pas une nouveauté. L’expression a été utilisée pour la première fois en 1956 lors d’un colloque organisé par les scientifiques américains Marvin Minsky et John McCarthy. Et dans les années 1960-1970, beaucoup de scientifiques étaient enthousiastes et imaginaient que la machine remplacerait l’homme dans les années 1980… L’IA a toujours été présente depuis des décennies (GPS, automatisation, tri du courrier, etc.) mais nous n’en avions pas forcément conscience. Ce qui est nouveau, c’est la prolifération des intelligences artificielles, l’accélération des usages de l’IA et leur diffusion large dans la vie publique, professionnelle et privée avec l’augmentation et stockage des données. Des logiciels tels que ChatGPT, les progrès accomplis dans le domaine de l’analyse d’images ou encore la génération de texte à partir d’instructions simples ont rendu les intelligences artificielles accessibles à tous, même sans compétences particulières.

Et nos collectivités ne sont pas en reste puisqu’une commune sur deux, en 2024, a expérimenté une solution utilisant l’IA. Une évolution des usages publics qui tient sans doute à la nature réelle des IA et à ce qu’elles nous permettent aujourd’hui. L’IA n’est que « la construction de programmes informatiques capables d’accomplir des tâches qui sont, pour l’instant, accomplies de façon plus satisfaisante par des êtres humains.» selon la définition de Marvin Minsky. Très loin donc du fantasme d’une machine consciente capable de prendre le dessus sur l’homme. Nous faisons simplement faire aux machines des choses que nous faisions, avant, avec notre intelligence. L’IA a permis la transformation de nombreux secteurs d’activités comme la médecine (détection précoce des maladies, diagnostics…), les sciences (recherche pharmaceutique, analyse des données en biologie, génomique, astrophysique…), la finance (algorithmes avancés, gestion des risques…), la cybersécurité. Et, bien sûr, dans le secteur de l’automobile (fonctions pilotées, maintenance prédictive…), un secteur qui me tient à cœur et qui est bien représenté dans la Nièvre et particulièrement à Nevers qui abrite la seule école publique en France d’ingénieurs pour tous les métiers de l’automobile et des transports, l’Institut Supérieur de l’Automobile et des Transports (ISAT). Le laboratoire de recherches Drive de l’lSAT travaille d’ailleurs sur l’IA appliquée à l’amélioration de la sécurité et à la robustesse des réseaux véhiculaires 5G. Des travaux menés dans le cadre d’un projet international (5G-INSIGHT) générant des preuves de concept permettent de développer des modèles de sécurité réseau intelligents et matures.

Les opportunités l’emportent donc objectivement sur les risques : les technologies basées sur l’IA sont des outils efficaces pour optimiser les processus, fluidifier les relations avec les citoyens, améliorer la qualité des services et réduire les coûts. L’IA est donc un enjeu hautement politique pour les territoires, leurs collectivités et leurs habitants. Et, à l’image des entreprises de pointe et des organismes de recherche, de nombreuses collectivités ont déjà intégré l’IA dans leurs politiques publiques. La régie eau de l’Agglomération de Nevers a développé, avec le Groupe Lacroix, une application unique en Europe pour maîtriser de façon optimale la distribution d’eau et surtout repérer et limiter les pertes. Ce développement s’intègre dans la démarche Territoire Intelligent que j’ai initiée avec mes équipes, axée sur la « smart mobility », la « smart energy » et la « smart water ». Concrètement, des enregistreurs de données autonomes (data loggers) permettent le contrôle en temps réel des réseaux de distribution d’eau. Le LACROIX Lab a développé un outil de visualisation très poussé qui permet de croiser les données de télégestion, de cartographie et de facturation afin d’améliorer l’exploitation des données. Tout ce déploiement de technologie et d’IA a permis d’accroître l’efficience de nos réseaux d’eau. Le rendement hydraulique a ainsi augmenté de 15%, pour atteindre 90% aujourd’hui (75% en France en moyenne) et nous place parmi les meilleurs. Cette efficience permet de préserver la ressource en eau de 200.000 m3 d’eau chaque année. Sans l’IA, cette performance n’aurait pas été possible.

Cependant, au-delà de cette application spécifique, l’IA est encore peu utilisée dans les services de la Ville de Nevers et de Nevers Agglomération. Quelques agents ont créé des comptes ChatGPT, notamment pour obtenir une synthèse rapide sur une thématique, en remplacement de l’analyse « manuelle » de résultats issus de moteurs de recherches internet. Le principal frein de recours à ce type d’outils reste la vérification et la sécurisation des sources de données. Depuis peu, une expérimentation nationale permet d’appliquer des algorithmes similaires sur des informations fiables et vérifiées : Delibia. Cet outil d’aide à la décision des agents et des élus permet de rechercher, analyser et rédiger plus efficacement grâce à une IA et un accès immédiat à plus de 1,8 million de décisions publiques de 5.000 collectivités. En ce qui concerne les métiers techniques, l’IA va se déployer progressivement et intégrer des logiciels métiers existants : analyse automatique d’images (vidéo-protection), analyses de données (logs serveurs informatiques, détection automatique de comportements inhabituels), croisement de données issus de capteurs connectés (amélioration de la gestion énergétique des bâtiments). Dans la continuité du projet Urbact IOT Xchange (qui vise le développement de plans de numérisation basés sur l’Internet des objets dans le but d’améliorer la qualité de vie dans les villes petites et médianes de l’Union européenne), nous étudions actuellement, en partenariat avec la société NGE Energies Solutions, la mise en place d’un hyperviseur afin d’optimiser la gestion de notre infrastructure informatique et l’utilisation des ressources, voire contrôler l’ensemble des services urbains. Il permettra à terme aux services de l’Agglomération mais aussi à ceux des communes membres de recevoir en temps réel les informations et les alertes issues de capteurs de l’IoT. Cela permettrait à des équipements éloignés les uns des autres de fonctionner en cohérence, pour des opérations optimisées, tout en réduisant la dépense publique. Car l’utilisation de l’IA s’inscrit aussi dans nos démarches de sobriété énergétique, de transition écologique et de meilleure gestion de l’argent public. Cet hyperviseur pourrait également faire de l’Agglomération de Nevers un démonstrateur à l’échelle 1 des solutions de Territoire Intelligent. Et sa promotion se ferait au travers du Sommet International de l’Innovation en Villes Médianes (SIIViM), du Réseau SIIViM–Mission Ecoter et lors des salons auxquels nous participons.

Ces évolutions doivent bien sûr avoir du sens. L’Agglomération de Nevers  reste vigilante à ce que ses actions en matière de digital et d’innovation puisse profiter à l’ensemble des habitants et soit en faveur de l’inclusion numérique, afin de permettre à chaque citoyen de bénéficier des apports du numérique et de tirer le meilleur parti des innovations développés sur le territoire. Conscients également de l’impact de l’essor des outils digitaux sur l’environnement, nous menons une réflexion autour du Numérique Responsable et travaillons autour de ces trois piliers essentiels que sont l’inclusion, la sobriété et l’éthique, afin de nous assurer que les solutions mises en œuvre aujourd’hui ne deviennent les problèmes de demain. En 2022, Nevers a obtenu le label Numérique Responsable (en intégrant directement le niveau 2), et est devenue la première municipalité française à recevoir cette distinction.

L’utilité et le progrès que représente l’IA sont donc indéniables et l’expérimentation locale le confirme. L’IA permet des gains substantiels de compétitivité et de productivité dans tous les secteurs de l’économie comme dans les services publics. L’IA est d’abord ce que l’on en fait. Il s’agit donc bien d’une question politique. Et il nous incombe alors, au niveau européen, national et local, de réguler pour développer une IA saine et éthique. L’humain doit garder la main pour que l’IA tienne sa promesse initiale de progrès et d’émancipation.

Denis THURIOT, Maire de Nevers , Président de Nevers Agglomération et Conseiller Régional Bourgogne-Franche-Comté, Président de Mission Ecoter






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