Hô Chi Minh City : ville où la mobilité urbaine est préoccupante


Rédigé par Yannick SOURISSEAU le Lundi 10 Décembre 2018 à 09:16

Avec un parc de plus de 10 millions de scooters et autres motocyclettes, pour une population de 12 millions d’habitants, la capitale du Sud Vietnam, Hô Chi Minh City, ex-Saïgon, ne brille pas par la qualité de son air. Malgré les efforts des gestionnaires de cette mégapole, poumon économique du pays, avec notamment la construction d’un métro, il reste encore beaucoup à faire.


Les Saïgonnais s'équipe de masques rudimentaires, souvent insuffisant pour filtrer les particules en suspension.
Ce qui surprend le plus en arrivant à Hô Chi Minh City, l’ex-Saigon, ce sont ces millions de motocyclettes et scooters qui circulent en pétaradant et en klaxonnant dans toutes les artères de la ville. Les vélos sont rares et sont utilisés par les minorités rurales qui s’aventurent en ville ou ceux qui n’ont pas les ressources financières pour acquérir un engin motorisé. Quant aux piétons qui doivent se frayer un chemin, non sans risque, au milieu de cette horde sauvage, ils sont encore plus rares et pas vraiment les bienvenus, car les scooters sont partout, dans la rue mais aussi sur les trottoirs, stationnés en nombre conséquent. 

Avec plus de 10 millions d’engins en circulation, auxquels s’ajoutent des voitures dont la filtration des gaz toxiques ne semble pas être la préoccupation majeure des constructeurs, le plus souvent chinois et japonais, le niveau de pollution sonore et atmosphérique est l’un des plus élevé au monde. Et même s’il n’atteint pas celui de villes comme Manille ou Bangkok, il reste bien au-dessus des normes acceptables. 

« Depuis les années 1990, Hô Chi Minh-Ville connaît un fort développement économique avec une croissance annuelle moyenne de 9,5 % du PIB régional. Ce développement tant urbanistique et économique qu’industriel s’accompagne mécaniquement d’une dégradation de l’environnement qui préoccupe les autorités », explique le Consulat Général de France à Hô Chi Minh City.

Ce sont surtout les effets conjugués du fort accroissement démographique, de l’augmentation du pouvoir d’achat et de la rapide motorisation des ménages qui ont entraîné un phénomène de congestion préoccupant pour la mobilité urbaine. D’autant plus fort que cette mégapole possède un faible réseau de transports en commun, les habitants préférant leur deux-roues motorisé, plus facile pour accéder dans les petites rues de la ville et accéder au plus près des échoppes, sans quitter le siège de leur engin. C’est notamment le cas de « Cholon », l’ex quartier chaud de Saïgon, dans le 5e arrondissement où se tient chaque jour le plus gros marché de gros et de détail de la ville. Les acheteurs pénètrent jusqu’au plus profond des ruelles étroites pour ressortir le scooter chargé comme un mulet. Par forte chaleur l’atmosphère y est quasiment irrespirable, tellement la concentration de gaz (SO2 (dioxyde de soufre) et NOx (oxydes d’azote)) y est importante.
 
« Le parc de motocycles vietnamien a triplé en 14 ans », poursuit le Consulat français. « L’amélioration du niveau de vie de la population, due à une croissance économique soutenue, a ainsi facilité l’accès des ménages à l’achat de motocycles ». Un scooter d’entrée de gamme, le plus courant, coûte entre 10 et 30 millions de Dôngs (la monnaie locale), soit entre 385 euros et 1155 €. Ce qui représente un a trois mois de salaire pour un vietnamien, le salaire moyen y étant de 338 €. Les motocycles sont donc beaucoup plus accessibles qu’une voiture, celle-ci étant réservée le plus souvent aux classes les plus aisées.   
 
« La part du transport en deux-roues motorisé est écrasante et représente environ 80 % des déplacements à Ho Chi Minh-Ville alors que celle des transports collectifs, essentiellement les bus, ne représente plus que 2 à 3 % du trafic urbain alors qu’il était dominant jusqu’au milieu des années 1980 », estime le consulat. « La part des déplacements en voiture individuelle est estimée à 8 % et croît rapidement ».
 
« Les habitants du Vietnam respirent un des huit plus mauvais airs du monde »

 Dans les parcs et jardins du centre-ville, aménagés par les français avant la guerre d’Indochine, et dans lesquels se retrouvent les Saïgonnais qui pratiquent le Tai Chi Chuan, tôt le matin, l’air y est un peu plus respirable du fait de la présence de grands arbres qui fixent la pollution de l’air, mais pas celle du bruit des moteurs et des klaxons. 
 
L’université américaine Yale a publié un index de performances environnementales qui classe les pays selon deux catégories : santé et préservation de l’écosystème. « Selon ce classement américain, le Vietnam arriverait à la 131ème place sur 180 pays et les habitants du Vietnam respireraient un des huit plus mauvais airs du monde. Le fléau ce sont surtout les particules en suspension ». 
 
Depuis 2012, le niveau total de particules en suspension (TSP), utilisé pour mesurer la concentration en masse de particules (PM) dans l’air, dépasse chaque année 2 à 3 fois les niveaux de sécurité à Hô Chi Minh-Ville tout comme à Hanoï, la capitale, Da Nang et Hai Phong, les principales villes du pays. Pratiquement tous les conducteurs de motocycles, s’équipent d’un masque rudimentaire, en tissu le plus souvent, pour éviter d’absorber ces particules fines dont on sait qu’elles peuvent se loger dans les poumons et causer bon nombre de maladie dont des cancers du poumon. 
 
Consciente du fait que cela pourrait ternir l’image de la ville et freiner les investissements, très nombreux dans cette ville en pleine croissance, la municipalité a donc décidé de prendre des mesures. Un projet a déjà été avancé, visant à relocaliser certaines grosses entreprises très polluantes hors du périmètre de la ville. De même un métro est en cours de construction.
 
Le projet de métro de Hô Chi Minh-Ville comprendra trois lignes de monorail d’une longueur totale de 37 km et six lignes partiellement souterraines faisant 107 km de long.Ce projet qui devrait couter 47.000 milliards de dôngs, soit l’équivalent de 2,07 milliards de dollars est avancé à 51% du volume total des travaux, lesquels devraient être achevés fin 2020.Mais la mise en place de ce moyen de transport collectif suffira-t-il à calmer l’appétit des Saïgonnais pour le scooter, moyen de déplacement qu’ils privilégient désormais, pas si sûr. A moins que la municipalité prenne des mesures drastiques pour l’interdire en centre-ville.  





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