Albi vise l’autosuffisance alimentaire, lentement, mais surement


Rédigé par Yannick SOURISSEAU le Lundi 4 Mai 2020 à 09:17

Acheter ses légumes chez les producteurs locaux, les cultiver dans son jardin ou dans un jardin partagé, l’idée prospère, encore plus en cette période de crise sanitaire où nombreux sont ceux qui prennent conscience de la nécessité de se nourrir sainement tout en soutenant l’agriculture de proximité. Plusieurs villes n’ont pas attendu cette crise pour engager une démarche d’autosuffisance alimentaire. C’est le cas d’Albi chef-lieu du département du Tarn, en région Occitanie.


Avec les Incroyables Comestibles, les petits jardins s'installent partout à Albi (Photo Facebook IC Albi)
Réussir l’autosuffisance alimentaire d’une ville, quelle qu’en soit la taille c’est d’abord une volonté politique. Plusieurs villes s’y sont essayées mais toute n’ont pas réussi, mais la tendance est bien là et elle devrait s’accélérer avec la période que nous traversons laquelle incite plus facilement à se tourner vers les petits commerçants du coin de la rue, sur les étals des marchés quand ces derniers sont ouverts, ou dans des fermes « bio » situées en périphérie de la ville, lesquelles livrent même des paniers de légumes à domicile.  
 
Pour répondre à ces enjeux de développement durable, la ville d’Albi (51 000 habitants) qui fait office de pionnière en la matière, s’est engagée dès 2014 dans une réflexion sur l’autosuffisance alimentaire de son territoire, avec notamment une démarche pour une agriculture et une alimentation de proximité. Baptisé « Projet Alimentaire Territorial de l’Albigeois », cette initiative ambitieuse visait l’autosuffisance alimentaire pour 2020. Nous y sommes…
 
Pour y parvenir, la ville du sud-ouest souhaitait réorganiser sa production agricole pour que la totalité de ce dont elle a besoin pour nourrir la population soit disponible dans un rayon de 60 km seulement. Privilégiant les circuits-courts, la ville d’Albi visait trois objectifs fondamentaux dans une telle démarche : réduire l’impact carbone des transports de marchandise, sécuriser les approvisionnements en cas de crise alimentaire et point non négligeable : assurer une meilleure qualité et traçabilité des produits consommés. Des objectifs difficiles à tenir pour la grande distribution qui s'approvisionne le plus souvent à l'autre bout de la planète. 
 
Mais il ne suffit pas de dire que l’on souhaite l’autosuffisance alimentaire pour y parvenir. Il faut d’abord se donner les moyens et convaincre la population qu’elle a tout à gagner en mangeant des légumes de saison, exempts de produits phytosanitaires, et dont la provenance est assurée.
 
« Permettre à un plus grand nombre de citadins d'accéder à une alimentation locale, saine et de qualité ».

 La ville a d’abord préempté 73 hectares de friches à deux pas du centre-ville pour les mettre à disposition de nouveaux maraîchers capable de produire des légumes frais, disponibles pour les habitants et les services municipaux. Mais le service Patrimoine Végétal et Environnement de la ville, avait anticipé le mouvement en s’engageant dès 2009 dans la mise en place d’espaces publics comestibles sur l’ensemble de la ville. De nombreux espaces verts accueillent désormais des espèces végétales comestibles que chacun peut cueillir librement. Plusieurs parcs disposent d’un potager public, dont certains sont entretenus par les Incroyables Comestibles Albigeois, ce mouvement qui favorise la culture et la cueillette urbaine collaborative et gratuite. 
 
Selon le site web de la ville « la Cuisine centrale municipale participe fortement à cette démarche globale en intégrant des critères environnementaux dans l'achat des denrées alimentaires nécessaires à la production des 3500 repas par jour qui alimentent quotidiennement les restaurants scolaires, les crèches, les centres de loisirs et le service de portage de repas à domicile ». Pour cela le service de restauration municipal a engagé une démarche de recherche de producteurs locaux en partenariat avec la chambre d’agriculture du Tarn. Cette initiative passe par une meilleure gestion des marchés de la ville lesquels doivent accueillir les producteurs locaux en priorité.
 
Pour les élus locaux, dont Madame la Maire Stéphanie GUIRAUD-CHAUMEIL (Divers Centre), ce projet doit répondre à plusieurs objectifs : « permettre à un plus grand nombre de citadins d'accéder à une alimentation locale, saine et de qualité ; renouer le lien entre l'urbain et le rural, entre les producteurs et les consommateurs ; réintroduire la production vivrière en ville ». Ce projet ambitieux « constitue une réponse aux impératifs écologiques, agricoles et sociétaux auxquels nous sommes confrontés depuis plusieurs années ».


Mais cette relocalisation de la production alimentaire, est loin d’être gagnée. L’an dernier en mai, lors de la fête de l’agriculture urbaine, un événement populaire qui faisait écho aux actions entreprises par la ville, une association locale affirmait, comptes en main, que l’objectif fixé ne serait pas atteint en 2020 comme prévu.  « Il aurait fallu trouver 18.000 hectares pour parvenir à nourrir les 51.000 habitants d'Albi. Et on est très loin du but », dénonçait l’association. Mais il y a des avancées. Sur les 73 hectares de la zone de friches située sur les bords du Tarn, la ville n’a pu en acquérir que 10, pour y installer des maraîchers.  « Mais ce processus est long. Il y a des ratés et on ne s'improvise pas producteur de légumes » rappelait France Bleu en présentant la fête. Quant aux jardins partagés dans les quartiers, certains sont en place depuis seulement l’an dernier. Enfin un nouveau marché a fait son apparition, celui de Castelviel, pour accueillir uniquement des producteurs vendeurs situés à moins de 60 km d'Albi, comme prévu dans le projet Albigeois. 





Dans la même rubrique :